Première escale, derniers regrets. [ Sheitan Belial ]

Se retrouver dans un tel endroit, ayant pour seul point de repère un homme qui était un inconnu quelques heures plus tôt, c'était très difficile pour le jeune garçon. Zack ne pouvait plus faire marche arrière mais il ne voulait pas non plus. Il voulait uniquement en savoir plus, s'accommoder à l'endroit, en savoir plus et devenir le meilleur. Cet homme qui de sa voix pourrait charmer le plus insensible barbare de ce monde devenait de plus en plus le père qu'il n'avait jamais eu, il aurait souhaité pouvoir tisser des liens invisibles entre eux, qu'ils soient toujours l'un et l'autre liés et dessinent ensemble un projet commun. Tout ce que disait ce grand brun était si touchant, personne ne s'était jamais occupé comme cela de Zack, mis à part sa grand-mère de cœur. Comme quoi, Zack était prédestiné à tisser des liens autres que ceux du sang. D'ailleurs sa famille se résumait à sa mère et éventuellement à un oncle qu'il ne voyait que peu. Une fois sa mère rayée de la liste il était sans famille.

"Merci, sans vous je n'aurais pas l'opportunité de servir à quelque chose, je vous suis redevable."

Ces quelques mots furent les seuls du jeune garçon sous le choc des nombreuses nouvelles de la journée. Les deux passèrent la cour principale et entrèrent dans un grand bâtiment où les fenêtres futuristes reflétaient le soleil. Sheitan connaissait l'endroit et cela se voyait, il ne parlait pas beaucoup, c'était certainement dans sa nature, c'est ce que pouvait affirmer Zack, bien que très agréable, l'ancien élève de Delilah était distant, froid et pourtant très gentil. Zack aurait pu lui faire confiance, il le savait, c'était de ce genre de personnes qu'il fallait s'entourer. Les gardes du corps n'étaient plus là, le jeune blondinet ne remarqua cela qu'une fois quelques couloirs passés, les pièces étaient lumineuses, l'ambiance très officielle et secrète. La peur se faisait remplacer au fur et à mesure par l'ambition et la curiosité. Des gens habillées de blouses scientifiques, des uniformes pour certains résidents, personne ne dévisageait personne, comme si tout le monde avait son activité et qu'il fallait s'y tenir. La rigueur n'effrayait pas le jeune homme, cela le motiverait encore plus dans les jours à venir. S'il devait remplir certaines missions et objectifs pour le bien de tous il s'y astreindrait sans rechigner. Des lits d'hôpitaux, des brancards, des médecins, des scientifiques, des gardes du corps, cette endroit serait une mine d'or pour quelqu'un des renseignements généraux, Zack ayant réussi à entrer ne savait lui même pas ce que tout cela voulait dire, mais le professeur lui ayant expliqué calmement que lui non plus ne savait pas tout, il restait confiant et la panique était dissoute dans ses yeux curieux.

Toujours derrière les tallons de celui qui transformait en plante ce qu'il désirait, après plusieurs escaliers et divers corridors, Zack s'arrêta enfin, devant une petite porte, regardant avec un sourire inquiet son guide au sein de l'établissement secret. Après tout Dellane avait l'air rassurant à côté de cela. Ce n'était qu'une porte, mais ce qui pouvait se cacher à l'intérieur était angoissant. Se dévoilant à lui une fois la porte ouverte, la chambre banale avait tout d'un havre de paix. Zack regrettait d'avoir mal jugé l'institut élitiste. Il y posa sa valise comme convenu et obéit à Sheitan sans poser la moindre question. Ils n'avaient pas le temps de bavasser selon l'adulte et une fois la porte fermée ils prirent à nouveau un couloir similaire aux autres, les bâtiments n'étaient pas grands, mais au total il y avait une multitudes de salles, c'était une impression étrange, comme si ce lieu avait des ressources illimités et que chaque jour il étonnerai le nouvel arrivant. Belial expliqua qu'ils devaient se rendre au maitre des lieux pour régler les facettes administratives de cette entrée incongrue, mais tout d'abord ils iraient déjeuner. Encore quelques minutes de découvertes et les deux arrivèrent dans un local cossu où tables et chaises étaient disposées parfaitement. N'ayant pas la moindre idée de l'heure qu'il était le jeune garçon se doutait qu'il était midi passé, que sinon cet endroit serait encore plein de personnages hauts en couleurs, et qu'il y verrait des élèves comme lui. D'ailleurs, chose importante que Zack commençait à vouloir élucider, pourquoi n'avait-il pas vu d'élèves encore. Enfin de jeunes de son âge, tous ici avaient l'air d'être très matures, comme des mercenaires pour une guerre quelconque. C'était impressionnant pour un garçon sortant de l'enfance de voir autant de choses sophistiquées, techniques et secrètes.

"Monsieur, j'ai une question, où sont les élèves? Je n'en ai pas encore vu... Vous savez, je suis intimidé et désireux de bien faire, mais j'aimerai que vous m'expliquiez tout."

Sheitan lui lança un regard noir, cet homme si beau était tellement impressionnant, il n'aurait pas voulu le mettre en colère, il n'avait aucun moyen de s'enfuir ni même de riposter face à tel carrure physique et son pouvoir dépassait de loin celui du jeune homme. Désormais il regrettait d'être venu ici, et surtout il regrettait d'avoir pris avec lui et son bagage une tonne de questions qu'il ne saurait retenir de ses lèvres.

Pour Sheitan sa mission devenait là bien plus importante qu'elle n'eut pu l'être auparavant. Elle devenait concrète, car si Sheitan était habitué à ne pas se préoccuper de ce qui l'entourait, choses et hommes. Seulement là, il emmenait un jeune garçon vers Delilah, il l'utilisait pour avoir les faveurs de son père et même s'il tenait tout de même à ce que Zack reçoive l'éducation qu'il lui avait promis, il n'en était pas tout à fait sûr. Se pourrait-il qu'il ressente du remord si ce gamin était envoyé à sa perte ? Non, il avait une mission, il ne devait pas l'oublier, il ne devait pas agir avec ses sentiments, il ne devait pas agir comme n'importe quel humain, ils étaient des idiots. Lui préférait agir selon sa raison. Ce qu'il souhaitait c'était d'obtenir plus de pouvoir, de devenir meilleur que n'importe qui, de pouvoir continuer ses activités, couvert par son père. Oui, cette vie où il contrôlait tout lui plaisait... Elle lui plaisait bien plus que celle où il était aux ordres de son père pour telle ou telle affaire.
La guerre entre Dellane et Delilah ne le regardait pas, il n'avait pas franchement envie de s'en mêler si elle ne lui apportait rien ou si son père refusait de le laisser jouer, de le laisser faire durer le jeu, jusqu'à ce qu'il ne retrouve son frère Kiryu et lui fasse payer les années de souffrance qu'il avait dû endurer par sa faute.

Mais, cette haine il ne la vouait pas contre ce garçon, au final il importait peu, tout ce qui l'intéressait n'avait rien à voir avec lui. Alors il essaierait, finalement de l'aider. De le soutenir au moins pour qu'il réussisse à Delilah, pour que peut-être il puisse vivre comme lui et évoluer, se forger une indépendance et devenir adulte. C'était la chose la plus importante pour le jeune Zack, car il n'avait personne hormis cette vieille dame et maintenant lui, et qu'il devrait apprendre à vivre sans eux, le plus rapidement possible. Être fort et ne pas tomber au moindre coup, ne pas se laisser avoir parce qu'il y a quelqu'un au-dessus de lui. Il devra apprendre à être lui-même, évoluer dans un seul sens, le sien.

La voix du jeune garçon résonna dans ses oreilles pendant quelques secondes encore avant qu'il ne se décide à répondre, d'une voix calme :

« Non, tu ne m'es pas redevable. Tu devras faire tes choix, simplement, les choix de ta vie, qui ne devront en aucun cas être des choix pour les autres. »

Le fait d'agrémenter ces quelques mots d'un sourire les rendraient sûrement plus doux à l'oreille, cela ne devait pas être un poids mais une nouvelle définition de la liberté. Même si intimement, il savait que Zack devrait probablement attendre un moment avant de pouvoir être libre, car même l'adulte qu'il était n'arrivait pas à sentir cette sensation.

Le jeune homme marchait d'un pas à la fois serein et pressé, Zack le suivait, multipliant des petits pas pour rester à la hauteur de Sheitan et ne pas le perdre de vue. Par ailleurs, le jeune docteur était parfaitement conscient qu'il marchait un peu trop vite pour le gamin, mais c'était voulu. Ce qu'il voyait, ce qu'il sentait, les gens qu'il croisait. Tout cela devait le stimuler et dans le même temps, il ne fallait pas qu'il s'en occupe, car la seule chose qui comptait était ce qui lui allait faire, pas ce qu'il se passait autour de lui. Zack devrait apprendre à maitriser parfaitement son pouvoir, si possible comme Sheitan. Et à partir de ce moment-là, cela irait sûrement mieux pour lui, mieux qu'il ne pourrait l'imaginer.

Mais, évidemment, le garçon qui l'accompagnait n'était pas aussi calme que le docteur l'aurait souhaité. Il pouvait comprendre, qu'il ait tant de questions à poser, à son sujet, au sujet de l'institution. Mais ce n'était pas le moment, car au fur et à mesure qu'ils se rapprochaient de la chambre du garçon, et dans le temps de la future discussion qu'ils auraient avec son père, Sheitan commençait à être stressé. Évidemment, ce serait difficile à croire, vu l'attitude qu'il affichait à ce moment là, mais cela devint beaucoup plus limpide quand son regard se posa sur le gamin qui venait de l'interroger. Seulement, il ne pouvait pas agir ainsi avec ce garçon qui devait avoir confiance en lui, alors il se reprit en se passant la main sur le visage.

« OK. Écoute Zack. Je comprends que ce soit difficile pour toi, tout ceci. Mais tu dois me faire confiance et avancer, sinon tu n'arriveras jamais à rien. Ici, c'est ta chance. Mais ce n'est pas Dellane, ce n'est pas une garderie ou quelque chose de ce genre. C'est sérieux, tu vas devoir être sérieux et mériter ta présence ici. »

Le jeune homme arrêta de parler quelques secondes pour regarder Zack quelques instants, stoppant sa marche pour lui parler calmement.

« Il faut que tu sois conscient d'une chose, il n'y a pas autant d'élèves ici qu'il y en aura à Dellane, cependant, c'est aussi pour une bonne raison. Tu pourras apprendre ici à maîtriser ton pouvoir et je t'aiderai. Et ensuite je te ramènerai à Dellane. Pour les explications, Monsieur Oroshi fera le reste. Tu ne peux plus aller en arrière, mais je serai là quand tu avanceras, et nous commençons maintenant. »

Le docteur reprit sa marche après un nouveau sourire pour le garçon, sans rien ajouter jusqu'à ce qu'ils parviennent à une chambre, celle qui appartenait maintenant à Zack.

« Bien, c'est ici. »

Il laissa au garçon le temps de se faire à sa nouvelle chambre, posant la valise près du lit.

[ Les propos qui suivent peuvent heurter la sensibilité de certains ]

Zack écoutait, Zack était présent mais n'osait plus répondre, impressionné par ce qu'il arrivait. Sheitan était différent, il était fort et dur, il allait en demander beaucoup à ce petit garçon qui aurait aimé ne pas en savoir plus, celui qui aurait aimé ne pas être curieux. Il posait son sac contenant des broutilles, vêtements et sa radio sur piles où il avait enregistré une cassette de ses chansons préférées. Il partirent manger ensuite, endroit calme et aseptisé, Zack comprenait ce qui allait lui arriver pendant les quelques semaines suivantes. Il ne rencontra le fameux chef d'établissement que trois semaines plus tard, à la fin de l'été, quelques jours avant une rentrée ordinaire. Il n'avait pas de nouvelles de madame Brasset et ne pouvait pas en donner, il n'allait plus dehors et sa seule occupation était d'obéir. Il ne pouvait pas faire autrement, vu le nombre de médecins et scientifiques présents ici, sans compter les gorilles de la sécurité, il ne pouvait s'enfuir ni même tenter un quelconque coup d'état. Il était enfermé et avait des consignes précises, se laisser faire et garder le silence.

Sheitan n'était plus là, même cette personne vile et malsaine lui manquait. Il était seul, côtoyait des masques blancs de chirurgiens et faisait prise de sang sur prise de sang, batteries de tests à la chaine et repas stricts. Ils recherchaient quelque chose sur son pouvoir ou autre et Zack ne pouvait même pas savoir ce que c'était, il n'avait aucune idée du temps qu'il faisait à l'extérieur, la fenêtre verrouillée de sa chambre lui empêchait de sentir, contre sa peau, l'air sauvage. Il voyait juste le soleil se lever, se coucher, et imaginait la sensation du vent, de la pluie, des éléments. Sheitan lui avait dit qu'il apprendrait à se servir de son pouvoir, ce n'était que vers la fin que des gens commencèrent à lui parler de cela, toujours emmitouflés dans des combinaisons étanches, ces chercheurs lui enseignèrent quelques rudiments et n'ayant que cela à faire, Zack apprit vite. Sheitan avait dit qu'il l'aiderait, ce ne fut pas le cas, il se débrouilla, entouré de gens aux visages invisibles, des gens à qui il ne serait pas venu l'idée de parler d'autre chose que du pouvoir et des essais. Il avait fini par réussir à faire tomber en lambeaux des larves, des petits insectes, puis un oiseau, et enfin un porc. Quel vision horrifiante que celle de tuer des animaux, mais Zack lui s'en fichait, il savait qu'il deviendrait assez fort pour mériter une indépendance comme celle qu'avait Sheitan, son tuteur, le père qu'il aurait rêvé d'avoir, tout en le détestant. Il laissa échapper de sa main le fluide invisible qui faisait éclater les veines généreuses du goret, il se mit à se débattre sans force, harnaché par des câbles lui transperçant la chair il allait quoi qu'il arrive dépérir de ses blessures. Son visage se creusa, son corps tout entier devint plus fin, les os apparaissaient désormais, les muscles se résorbaient, les yeux de l'animal commençaient à se liquéfier, jusqu'à ce que son corps ne fut plus que cendres et os, petite flaque qu'il restait d'un être vivant il y a quelques secondes. L'exercice plongea Zack dans un mutisme, revoyant la scène et riant, comme un évadé d'hôpital psychiatrique. Sa principale maladie était la solitude, la solitude et l'enfermement, obligé de se faire lever par un médecin chaque matin qui vérifiait les yeux, les dents, les organes principaux du jeune garçon, sa chambre était dépourvue de douche, chose qu'il n'avait pas vu au premier coup d'œil, il se faisait donc asperger par une lance à eau qui servirait à merveille à un pompier. Ensuite il ingurgitait la bouillie du repas matinal quotidien, et il partait ensuite vers les salles où il avait rendez vous chaque matin.

Si on avait forcé Zack à parler allemand et à se faire tatouer un numéro sur le bras il se prendrait pour un déporté, quoi que rien n'était comparable, au final il sortirait d'ici grandit et plus fort. Mais au moment pour un garçon de dix-sept ans il ne voyait pas pire torture que celle qui lui était infligée chaque jour. Son pouvoir augmentait de jour en jour et au terme de la dernière semaine de séjour ici il était déclaré capable de tuer un homme, bien qu'il priait chaque soir qu'on attache pas un enfant et qu'il soit contraint à poser ses mains et à se concentrer sur lui. Son pouvoir était exactement défini par ces mots selon les médecins : « Personne capable d'accélérer le mécanisme des cellules d'un être vivant ». Zack ne pouvait pourtant pas faire grandir un enfant plus vite ou quoi que ce soit d'autre, il n'avait même pas essayé sur lui son propre don, savoir s'il pouvait un jour se donner la mort. Il attendait tellement le retour de Sheitan et son départ de cette prison qu'était Delilah que le jour où cela arriva il ne fut même pas surpris. Amorphe par le traitement de simple cobaye de l'institut spécial dans lequel il se trouvait.

Le professeur et médecin arriva dans la chambre de Zack au petit matin, et lui demanda de se préparer en vitesse. Il le fit, machinalement, profitant de chaque seconde comme si s'habiller seul était un cadeau du ciel et les verbes pronominaux une invention géniale. Le jeune garçon passa son tee-shirt blanc et son pantalon avant de lacer ses chaussures comme un enfant gauche. Il ne broncha pas, ne posait plus toutes ces questions, le cerveau lavé et blanchi au compte de cet Alexis Oroshi, cette rumeur qu'il allait enfin rencontrer, Sheitan dans ses propos laissait entendre que le jeune garçon aurait une nouvelle mission désormais. Pourvu qu'il ne soit pas envoyé en porcherie pour s'occuper des récalcitrants, ou même être la personne qui nettoie les preuves des meurtres, ou autres sales coups des scientifiques ne lui plairait pas, il voulait voir le monde, maintenant il savait qu'il désirait plus que tout la liberté, que c'était ce pouvoir qui lui avait donné la liberté, que la liberté lui avait fait mal, elle l'avait fait souffrir mais c'était une maitresse si agréable quand on apprend à lui parler. Dans le couloir interdit, devant la porte bien gardée, Zack le plus grand des curieux essayait de garder la tête la plus basse possible sans qu'elle puisse se décrocher de ses épaules. Il allait enfin savoir qui était cet homme et surtout savoir s'il allait ou non pouvoir goûter à nouveau aux joies du « dehors ».

Évidemment, Sheitan savait très bien ce que Zack subirait. Seulement les choses ne s'étaient pas passées comme il l'avait souhaité. Le jeune docteur, en laissant Zack seul, avait été reçu par son père. Alexis Oroshi l'avait d'abord accueilli de la plus belle façon, avec de beaux compliments, mais lorsque le jeune homme avait posé certaines conditions, le ton changea rapidement. Sheitan voulait pouvoir diriger le garçon et participer à son évolution. Non pas parce qu'il lui avait promis, parce qu'il avait dit à ce gamin qu'il serait un guide pour lui, mais parce que le professeur ne savait que trop bien ce qui allait se passer.
Alors Oroshi se leva de sa chaise et adressa à un regard noir à son fils, lui expliquant qu'il n'avait aucun droit sur cette entreprise et qu'il devait se contenter à lui amener de la matière, le reste ne le regardant pas et qu'il pouvait maintenant disposer.
Le jeune homme ne pouvait pas lutter, il le savait bien et il n'en avait pas l'intérêt, sinon il pourrait perdre beaucoup de ses bénéfices, alors il resta en dehors de tout cela et ne fut informé de rien.
Ainsi ce qui se passait à Delilah ne le regardait pas, mais le docteur ne pouvait s'empêcher de penser à sa propre enfance quand il songeait à la formation de Zack, car le garçon insouciant serait transformé en machine en quelques semaines seulement. Et le coup de fil qui reçut un soir, provenant d'un des assistants de son père lui indiqua que cela s'était passé très rapidement...
Il profita d'une journée d'été calme pour rejoindre l'organisation. Il posa un jour de congé auprès de Sanzo Kichigai, évoquant un besoin de se rendre à Clermont-Ferrand pour rendre visite à un ami dans le besoin. Le directeur ne lui demanda pas plus d'explications et le lendemain à l'aube, le jeune homme rejoignit donc l'assistant qui l'avait appelé à Brioude. Les deux hommes prirent la route sans détour cette fois-ci, jusqu'à l'organisation.
Sheitan demanda des nouvelles du jeune garçon et l'assistant répondit avec un sourire. Son aide avait été précieuse et son apprentissage s'était très bien passé. Le docteur savait très bien ce que cela signifiait. Bien sûr cet idiot d'assistant ne pouvait pas deviner ce que cela faisait, de se sentir plus bas que tout, de s'épuiser totalement en usant son pouvoir et de n'avoir aucune échappatoire. Zack avait vécu un extrait de l'enfance du professeur. L'enfermement, la solitude, l'épuisement, la haine du monde et de soi, de ce pouvoir et de cette vie. Le mutant se serait bien débarrassé de cet imbécile, s'il n'avait pas été un de chouchous de son père, un assistant uniquement assoiffé de pouvoir et d'argent.

Le jeune homme fut amené directement au bureau de son père qui prit soin de lui parler avec une voix des plus doucereuse et désagréable, lui signifiant clairement où était l'ironie...

« Bien Sheitan. Je pense que tu sais pourquoi tu es là. Ton petit protégé a fini sa formation, tu vas pouvoir le ramasser. Va le chercher. »

Un sourire de l'assistant lui donna envie de rendre son petit déjeuner sur le beau costume qu'il portait, mais ce n'était pas dans ses habitudes de se laisser ainsi aller par ses humeurs, et il se rendit donc à la chambre du garçon. Il n'eut pas vraiment de surprise, en ouvrant la porte, de voir que la personne qui se réveilla semblait au plus mal, déjà amaigri, Zack lui accorda un regard vide, et s'exécuta sans un mot lorsqu'il lui demanda de s'habiller rapidement.
Sheitan savait que le fait que Oroshi tienne à ce que le jeune homme s'en occupe à présent était en quelque sorte sa punition. Il avait manqué de respect à son père en lui demandant de s'occuper de la formation du jeune contrôleur de l'espace temps, et le directeur de l'organisation n'avait pas du tout apprécié cela.
Pendant quelques instants, en observant Zack marcher à ses côtés, le docteur se demanda s'il ne ferait pas mieux de le porter, mais finalement le garçon réussissait encore à traîner son corps, et le jeune homme décida qu'il était probablement préférable de lui annoncer à demi mots ce qui l'attendait.

« Nous allons au bureau de Alexis Oroshi, à sa demande... Ta formation est maintenant terminée et il a d'autres plans pour toi, qui me concernent apparemment. »

Pour le moment, le docteur ne pouvait rien dire d'autre, il savait qu'il était surveillé, mais il aurait un travail à faire sur Zack, il le savait, car c'était le même travail qu'il avait fait sur lui-même pour se remettre sur un meilleur chemin.
Finalement, ils arrivèrent devant la porte du bureau de son père, il fit entrer Zack et le suivit de près. Les deux s'installèrent sur des fauteuils, en face de l'homme. Enfin, Alexis Oroshi était de dos, dans un effet théâtral le fauteuil se tourna et le visage du directeur souriant se montra aux deux personnes. Alexis Oroshi les toisa du regard l'un après l'autre, avant de prendre la parole :

« Bonjour Zack. Je tiens d'abord à te féliciter, les résultats sont tout à fait satisfaisants.
Mais à présent, tu vas avoir autre chose à faire. Sheitan ici présent semblait tenir au fait que tu l'accompagnes dans sa mission et ce sera donc le cas, car je sais répondre aux attentes de mes collaborateurs...
Je suppose qu'il sera apte à t'expliquer ce que nous attendons de toi. »

L'homme les observa à nouveau avant de reprendre la parole, l'accompagnant d'un geste de la main.

« Bien maintenant que tout est d'accord, vous pouvez sortir d'ici. À bientôt. »

Les deux mutants furent sortis du bureau par les assistants, Sheitan se retrouva face à Zack. Le jeune homme soupira et lui fit signe de le suivre.

« Suis-moi, pour le moment tu n'as pas le choix. Allons chercher tes affaires. »

Sheitan ignorait totalement ce que pensait ce gamin qui marchait derrière lui, il réalisait juste que la haine qu'il avait contre son père était grandissante.

[ Les propos qui suivent peuvent heurter la sensibilité de certains ]

Il ne pouvait pas l'écouter, il ne pouvait pas le regarder, pourtant il s'y obligeait, pour la bienséance, pour être gracié, sortir d'ici au plus vite. Arrêter ces expérimentations, arrêter cette routine qui mettait le blondinet hors du temps, arrêter cette vie, se donner la mort pour n'avoir plus aucune de ces images en tête. Cet homme dont il avait longuement imaginé le visage, maintes et maintes fois fantasmé la mort, était face à lui, lui parlait comme si tout cela était normal et réel. Or, pour le commun des mortels, cela ne pouvait être normal, ni même réalisable. Dans la vie que menait Zack tout était possible mais jamais juste. La justice n'existait plus, la police était inexistante, la limite était bannie de son conscient, les règles ne devaient plus servir qu'à les enfreindre. Il aurait souhaité sauter sur le bureau, mettre sa main sur le visage déjà défraichi par la noirceur du cœur de cette ordure. L'assassin qui sommeillait dans le jeune adolescent voulait surgir, mais les drogues, médicaments, et différentes plaies sur son corps ne laissaient que peu de force et le garde rapproché non loin aurait réglé la tentative de coup d'état en un clin d'œil, alors il écoutait, sans fermer son esprit, essayant de se souvenir des derniers mots positifs de sa vie d'avant. Il ne savait même plus quel crétin lui avait donné cette indication, ce fameux institut, cette arnaque. Dellane était le paradis, Delilah était l'enfer. Peu à peu, Sheitan avait le visage corrompu par les idées confuses de Zack, essayant de recouvrir sa capacité à penser. Il lui avait promis tant de choses, et ne lui avait apporté que malheur, cet homme avait l'air bon pourtant, mais ce ne devait pas être le cas. Connaissant l'existence de deux lieux cachés du regard des autres, le jeune Lacroix, orphelin de camp, se sentait rassuré et traqué. Les yeux de cet Oroshi, nom de serpent à ses oreilles, luisaient dans la semi pénombre de la pièce, révélant en Zack des pulsions, des émotions jusque là encore enfouies dans son reste d'humanité.

Il retrouvait peu à peu le monde réel, en se préparant à sortir d'ici mentalement, car c'est ce qu'il ferait, il en était assuré, le pouvoir ne donnait rien à l'organisation secrète et les nombreuses prises de sang n'apportaient rien de plus chaque jour, mis à part l'essoufflement de l'organisme du jeune mutant. Le chef des lieux, d'allure classique et chic, portait en lui la marque du démon, celle qui même invisible se voit. Observant avec attention le bureau où était entassé une myriade de dossiers et fiches diverses Lacroix aperçut des fiches identitaires de jeunes de son âge probablement. Essayant de lire sans attirer l'attention il remarqua des caractères incompréhensibles, de plus les feuilles étaient tournées à l'opposé du blondinet. Il aurait voulu comme un gladiateur défier le dux bellorum, le provoquer en duel et dans un amphithéâtre rageant d'enthousiasme planter une dernière fois l'épée dans le crâne sanglant de l'invincible terrassé. Alexis Oroshi devait mourir et non pas de vieillesse, ou alors accélérée par les pouvoirs de Zack, qu'il puisse contenir son corps entre ses mains, tel un tas de poussière qu'il ferait voler à son expiration. Il profiterai de chaque jour pouvoir lui infliger une torture, le bourrer de médicaments et d'anesthésiants tout comme l'était jusqu'à ce jour le futur adulte, lui couper membre par membre son corps d'homme respecté, lui faire déguster cette vengeance qui ruisselait dans les veines de Lacroix comme du poison. Méfiant, Zack canalisa ses envies, sa rage, ses pensées, ne voulant pas être découvert par un télépathe il redevint le légume qu'il était, quelques secondes plus tôt. Comme l'opium pour un dépravé, la descente de cette drogue dure était difficile.

Il suivit Sheitan, poussé sans virulence hors de la salle qui sentait le cuir neuf et aseptisé. Son corps n'était plus que muscles et os, il n'avait que de poids à reprendre et un seul repas suffirait à lui donner quelques kilos en trop. Cela devait faire trois, quatre semaines peut-être qu'il n'avait pas goûté à un dessert, ou même à une pomme, en tout cas la saveur et la texture serait meilleure qu'une bouillie d'antalgiques et de neuroleptiques. Tout comme l'alcool dans le vin, la drogue dans la nourriture de Zack le rendait ivre, son teint était de plus en plus blafard et il aurait fait peur, même le jour d'halloween. Les feuilles devenaient rougeoyantes, magnifique image que celle de l'extérieur, ce plaisir si intense qui se rapprochait à grands pas. Sans poser de questions il se dirigea, toujours escorté par son présumé mentor à sa chambre. Il saisit son sac, regroupa ses affaires qui n'étaient même pas déballées, sinon confisquées, vérifia avec hâte que tout était prêt et regarda celui qui se tenait sur le pas de la porte avec admiration et une forme de haine passive.

"Vous avez vécu ça ?"

Sans même lui laisser le temps d'y répondre il enchaina sa phrase par une prise de souffle qui annonçait des pleurs :

"Je n'avais pas fait au lit depuis mes sept ans, tous les jours je me fais dessus, j'ai peur, j'ai vomi chacun de mes repas et je reçois des coups. Mon corps est marqué et mon esprit l'est aussi, je vous déteste..."

Il laissa enfin ce qui le rongeait sortir de lui, c'était fait, il le regrettait désormais mais il n'avait plus cela à dire, il pourrait à nouveau encaisser des coups jusqu'à devoir encore craquer comme cette fois. Ses mots étaient sortis comme s'il avait préparé son discours depuis des mois, les mots, l'intonation, même les quelques reniflements étaient presque dignes d'un acteur professionnel. Il aurait voulu que Sheitan le prenne dans ses bras, oubliant son statut de professeur, oubliant cette barrière invisible qui les séparaient car au fond ils n'étaient que semblables.

Ces couloirs, ces odeurs, cet enfant qui se traînait derrière lui... Cet ensemble de choses tellement familières... Mais pourtant ce n'était pas chez lui, il avait vécu ici, mais rien ne l'attirait, les mauvais souvenirs étaient les seules choses présentes à son esprit. Alexis Oroshi, son père qui avait juré sa protection n'avait pas daigné lui accorder quelques mots supplémentaires, ou un regard encourageant. Non, pour lui il importait peu, il n'était pas son fils, il était une expérimentation, tout comme le jeune mutant assis près de lui. Sheitan savait ce qui allait se passer. On lui enverrait bientôt un nouveau message, si jamais il n'avait toujours pas trouvé la trace de son benjamin... Et peut-être même que cette fois on lui enverrait quelqu'un, pour lui faire comprendre que les choses pressaient.
Mais le jeune homme ne voulait plus agir pour lui, pour ce père, pour cette organisation qu'il connaissait trop bien pour supporter. Cette douleur là ne l'intéressait pas.
Après que Alexis ait terminé et que les deux jeunes mutants furent sortis du bureau, le docteur dut affronter le regard de ce garçon. Un regard dénué de vie, que Sheitan chassa de son esprit en se concentrant sur ce qu'il devait faire.

Alors ils retournèrent dans la chambre de Zack, il remarqua que ses affaires n'avaient pas été déballées. Au moins ils ne lui avaient rien pris.
Le garçon se tourna vers lui, sa voix qui avait un ton accusateur devint tremblante au fur et à mesure qu'il parlait, avant qu'il ne se mette à pleurer.
Évidemment, Sheitan savait. Il était une des seules personnes en ce monde à pouvoir comprendre Zack. Le jeune homme ferma la porte de la chambre du garçon, rentrant à l'intérieur, et leva un regard noir vers la caméra, cachée dans un des coins du plafond, elle était là pour surveiller ce faible garçon, pouvoir pervers de Alexis Oroshi. Le docteur sortit de sa poche sa carte d'entrée pour Delilah et l'envoya vers cette caméra, la plante se faufila dans les recoins de celle-ci avant de la détruire.
Il resta à observer le garçon et finit par s'approcher de lui... Combien de fois avait-il souhaité que son père ait un geste pour lui, que quelqu'un vienne l'aider ? Le seul assistant à avoir essayé de lui rendre la vie plus facile avait été affecté ailleurs.
Sheitan posa une main sur l'épaule de Zack et s'approcha encore de lui pour lui murmurer :

« Ça va aller maintenant, je t'amène à Dellane. »

C'était plus pour le rassurer qu'autre chose mais au final cette humanité qu'il ressentait à présent était comme une nouvelle sensation. Comme une réponse aux questions qu'il s'était posé pendant ce temps où Zack avait été retenu prisonnier. Il voulait l'aider car lui-même avait eu besoin d'aide. Il avait d'abord pensé qu'envoyer d'autres mutants là-bas l'aurait aidé à se venger de sa propre vie et au départ ça avait été le cas, quand il obtenait enfin des félicitations de la part de son père... Mais avec Zack ce fut différent, sans qu'il comprenne pourquoi. Son esprit malsain était toujours là, mais il savait ce qu'était devenu ce garçon poli et discret.

Le jeune homme sortit un mouchoir de sa veste et le donna au garçon, avant d'aller récupérer sa carte. Tant pis pour la caméra et la punition qu'il recevrait, il devait maintenant se dépêcher pour que Zack soit libre et que rien ne lui retombe dessus.
Ses battements de cœur s'accéléraient alors qu'il réfléchissait. Il se saisit de la valise du garçon et le regarda une nouvelle fois, il n'était pas en état de se dépêcher justement.

« Monte sur mon dos. »

Le regard incrédule du garçon le fit soupirer avant qu'il ne s'accroupisse pour que le jeune mutant s'exécute.

« Vite ! »

Finalement il le fit, Sheitan sortit donc de cette chambre, soutenant d'un bras le garçon dans son dos, tenant de l'autre la valise de ce dernier. Les gens qu'ils croisaient se moquèrent de l'attitude du jeune homme, mais il n'y fit pas attention, se contentant de leur jeter des regards noirs.
Bientôt ils arrivèrent dehors, grâce aux grandes enjambées du professeur.
Ce dernier demanda les clefs de la voiture au garde qui les attendait, on put alors entendre dans son talkie-walkie la voix de Alexis Oroshi qui donnait son accord dans un grésillement. Sheitan, regardant vers l'emplacement du bureau du directeur, laissa Zack descendre de son dos et s'installer sur le siège passager avant de la voiture. Le jeune homme posa la valise dans le coffre avant de rapidement prendre place au volant.
En fait, cette voiture était superbe, n'importe qui l'aurait remarqué, n'importe qui aurait été ébahi. Mais le jeune homme s'en fichait royalement, tout ce qui comptait était que cette machine pourrait l'amener loin d'ici.
La voiture démarra enfin et se mit à rouler, alors que les deux protagonistes restaient silencieux, jusqu'à ce qu'il soit définitivement sortis de l'endroit. Sheitan vérifiait que personne ne les suivait, il débrancha le GPS par prudence, et son portable aussi. Il voulait être tranquille, jusqu'à Dellane.
Mais il s'arrêta avant, sur la route, après avoir dépassé une roulotte à pizza.
Il ne dit rien à Zack, il n'osait plus rien lui dire comme le garçon restait silencieux, sûrement trop choqué d'être enfin libre... Le jeune homme sortit de la voiture et fit sortir Zack, avant de se diriger avec lui vers la roulotte. Il commanda deux pizzas, sans même demander l'avis du garçon, deux reines. Puis il amena Zack jusqu'à une table, le poussant légèrement avec sa main dans le dos.
Finalement, avant que la nourriture arrive, il réussit à s'exprimer.

« Tu peux me détester, je peux le comprendre. Mais il va sûrement falloir que tu m'aides, afin que nous n'ayons pas de problèmes à Dellane, car ils nous surveillerons, ils me surveillent déjà. Par contre, tu vivras comme n'importe quel élève, avec les avantages et les inconvénients. »

Les pizzas arrivèrent alors, le serveur demanda au jeune homme si le garçon allait bien et Sheitan lui répondit avec un sourire.

« Il vient de sortir de l'enfer, ça ira mieux bientôt. »

Après avoir détruit la caméra par un joli tour de passe-passe le mentor un peu dur s'approcha de Zack, ce dernier pensant que la fin arrivait, et elle arrivait maintenant. Enfermés tous deux dans cette chambre exiguë les mots du presque adulte auraient réveillé en son professeur tout la rage enfouie contre les autres et il aurait passé ses nerfs sur lui et c'était compréhensible. Une fois à hauteur de la tête du jeune garçon qui plissait les yeux d'anxiété il lui chuchota la chose la plus improbable sortant de la bouche de quelqu'un dépourvu d'altruisme. Un sourire voulait échapper la bouche de Zack mais son corps faible retenait tout signe d'émotion à l'intérieur. Et en dedans il se passait une chose agréable, tout allait mieux sans qu'il aille bien, Zack retrouvait le goût de la vie, des autres et il savait que Sheitan était la meilleure personne sur qui il pouvait être tombé depuis le départ de sa maison.

Les yeux écarquillés Zack regardait celui qui voulait être son destrier. Cependant Zack n'y voyait pas l'intérêt, il pouvait se trainer jusqu'à l'extérieur, fournir un dernier effort, là n'était pas le problème. Zack s'exécuta tant bien que mal, Sheitan prit la valise et sorti à toute allure, comme si le temps pressait alors que tout allait bien, la liberté était au bout, la liberté, les autres, la vie, madame Brasset, les croissants, la vie simple, le grand air... Tout. Balloté dans tous les sens par le mouvement brusque de la course il perdait conscience, pas totalement car il arrivait à retenir son envie de régurgiter sa dernière purée toxique. La porte de dehors franchie il s'efforça à ouvrir les yeux et découvrit que le monde n'avait pas changé, il n'étais pas beau, ni même laid, il était comme avant, normal, mais il avait un attrait différent. Le vent était agréable bien qu'il percutait le crâne de celui qui ne l'avait pas ressenti depuis quelques semaines avec virulence. Le mouchoir encore serré entre ses doigts, il s'y raccrochait et sentait son odeur sur la partie non souillée par les larmes de Zack, Sheitan avait une odeur tellement raffinée... Une fois à terre le jeune garçon eut du mal à garder ses jambes droites. Il regarda la voiture avec admiration, ne comprenant plus rien, si c'était celle du professeur ou non, il ne l'avait pas entendu prendre la parole, non tout cela était comme un rêve déjà terminé, il s'en souvenait au moment et l'oubliait quelques secondes plus tard. Tout était si rapide et bref qu'il ne savait plus quoi faire une fois installé, ceinture bouclée et les yeux rivés vers son ange gardien.

Le trajet fut court, comme sur le dos du professeur, il s'endormait à moitié sur la vitre, enivré par les paysages inconnus et lointains, parcourant le trajet inverse, il ne voulait plus revenir ici, c'était pour cela qu'il ne savait pas où il se trouvait. Puis la voiture s'arrêta Zack sortit après le professeur qui lui ouvrit la porte et lui prit le bras. Une pizzéria itinérante installée au beau milieu de nulle part s'occuperait des estomacs des deux hommes. Deux pizzas reines, seraient livrées à la table qu'ils occupaient. Le serveur habillé de blanc, stéréotype de l'italien qui fait tourner la pâte sur ses doigts en l'air arriva et demanda de sa voix dépourvue d'accent étranger si Zack allait bien. Son teint proche de celui d'un mort et ses joues creuses sembler prouver le contraire de ce qu'annonçait le professeur. Le médecin fit rougir le petit blondinet à la coiffure désordonnée avec ses mots. Mais il passa à autre chose une fois le festin en face de lui, l'odeur de ce met simple suffisait à remplir l'estomac du contrôleur de l'espace-temps comme ils disaient l'intérieur de Delilah. Une fois avoir avalé en vitesse son premier vrai repas depuis ces derniers évènements Zack, mené par le jeune professeur partirent vers Dellane. Le trajet dans la spacieuse et confortable berline était long et l'ambiance pesante. Le dialogue s'installait bien que depuis le repas des banalités avaient été leur seul échange. Après un timide éclaircissement de gorge et un camion de cargaison étrangère doublé Zack se décida à masquer le son de la radio par sa voix :

"Je vous remercie, bien que j'aurais préféré que cela se passe autrement, j'espère juste que je pourrais compter sur vous éternellement..."

Zack voulait pleurer, sa voix était encore marquée par l'émotion, il repensait à toutes ces personnes qui lui avaient tourné le dos un jour, sa mère, son père, ses quelques camarades d'école, madame Brasset qui s'était maintenant débarrassée de lui sans se poser de questions, tout le monde. Sheitan devait être celui qui comblerait le manque des autres, il était déjà haut dans l'estime du blondinet, il avait compris que sa vie était tracée par une organisation aux pouvoirs incommensurables et qu'il se devait d'y emmener Zack, ensuite il avait tout fait pour le prendre sous son aile, maintenant chose faite, Zack lui obéirait, à jamais, bien que déçu et blessé à jamais par ce centre machiavélique.

"Je ferai tout ce que je peux pour vous aider, mais dites moi, quel sera mon rôle dans l'autre camp professeur?"

Après tout il devait être totalement informé de ce qu'il se passerait une fois là bas s'il allait être épié. Et pour pouvoir aider et donner le maximum de sa personne à celui qui lui a permit de sortir de ce cauchemar il devait être à cent pour cent dans son personnage. Bien qu'il ne jouerait pas la comédie, il devrait simplement se taire, se taire et être l'ombre des autres, ne pas se faire remarquer sans que cela ne soit pas suspect...

Le fait de conduire un peu lui donnait une impression de liberté, cela l'apaisait légèrement, une vague sensation de bien être qui parcourait son corps. Parfois elle vous endormait simplement, sans que vous puissiez lutter, mais dans le cas de Sheitan, cela ne pouvait être le cas. Malgré les apparences qu'il tentait de sauver, le jeune homme était stressé, serrant son volant, il ne quittait la route des yeux uniquement pour jeter un œil au rétroviseur ou à son protégé semblant assoupi.
Son visage sans expression cachait une crainte certaine. Maintenant il serait encore plus surveillé qu'auparavant. Ses mouvements seront limités, ainsi que le serait son temps imparti pour trouver son jeune frère et destituer Kichigai.
Il n'avait plus le droit de jouer à présent et devait simplement agir.

Arrivés près d'une pizzeria ambulante, le professeur décida de s'arrêter, il serait trop tard pour manger à Dellane, alors autant en profiter. L'arrêt fut court, Sheitan observa Zack engloutir son repas, cela le rassurait qu'il mange, c'était un bon signe. Il souhaitait avant tout que le garçon soit en meilleure forme, c'était le principal pour le moment.
Une fois leur repas terminé, le docteur s'alluma une cigarette avant d'aller payer le pizzaïolo. Signe de sa nervosité : il finit le tube remplit de tabac en moins d'une minute.
Montant dans la voiture après Zack, ils repartirent sur la route.
Le jeune homme engagea la conversation sur plusieurs choses, mais l'internement du garçon ne fut pas évoqué. Il n'avait pas de questions à lui poser à ce sujet car il savait. Il savait tout ce qu'il s'était passé et ce que le jeune mutant avait ressenti, il savait aussi que rien ne pourrait changer cela.
Au final, lors d'un blanc, son premier réflexe fut d'allumer la radio, histoire de créer un fond musical. Le garçon avait repris un peu de couleurs depuis leur repas chaud, mais il faudrait encore un peu de temps avant qu'il reprenne vraiment du poil de la bête.

Au bout de quelques temps, le garçon s'éclaircit la gorge, alors que le docteur venait de dépasser un camion, relâchant quelque peu l'accélérateur, pour prendre la parole de manière sans doute un peu plus solennelle. Sheitan le laissa parler sans quitter la route des yeux, diminuant le son de la radio au fur et à mesure que Zack s'exprimait.
Le jeune docteur ne voulait pas répondre et par ailleurs il n'avait rien à lui dire à ce moment là. Ce n'était pas tellement qu'il regrettait, il n'avait pas pu faire autrement, il n'aurait jamais pu aller contre les ordres de son père et on l'aurait informé de cela, qu'il aurait laissé passer une occasion.
Il avait détruit l'adolescence du jeune blond et devait maintenant en assumer les conséquences, au final ce n'était pas très compliqué.

La réponse à la question de Zack l'était un peu plus... Le jeune homme prit le temps de répondre, jusqu'à ce que le son de la radio se mette à grésiller, et qu'une voix se fasse très distinctement entendre.

« Oui Sheitan, quel sera son rôle ? »

Les mains du docteur se crispèrent sur le volant alors qu'il reconnaissait la voix de son père.

« Evidemment, il y a des micros partout ici... »

« Tu as toujours tendance à exagérer les choses, mais parles moi donc de ton plan... »

« Tu le connais car c'est la mission que tu m'as donné, je dois retrouver ton fils et prendre la place de Sanzo. »

Sa voix était sèche et tranchante, il aurait aimé passer sous un tunnel à ce moment là, mais cela ne pouvait être le cas, ils entraient dans Brioude.

« Justement, n'oublies pas que tu travailles pour moi. Zack, tu seras son associé, mais si jamais il commet la moindre erreur, tu es chargé de m'en rendre compte. Le reste te sera expliqué par Sheitan, en attendant gares-toi au centre commercial, vous prendrez un taxi. »

La communication fut coupée et le jeune homme, excédé, s'exécuta avant de descendre de la voiture, lançant un regard noir à l'assistant qui arborait un air amusé et avait la main tendue vers lui, attendant les clefs que le docteur lui donna.
Après avoir attrapé la valise du garçon dans le coffre il lui fit signe de le suivre jusqu'au taxi. Ils s'installèrent à l'arrière, Sheitan croisait les bras et regardait par la fenêtre avec un air sévère, fulminant. Son père était décidément toujours premier, mais cela devrait bientôt changer...

Zack ne comprenait rien et s'en fichait, sa mission était claire, amener Sheitan à la place de ce Sanzo, qui se trouvait être le directeur de Dellane selon son mentor. Et de retrouver le fils du grand patron. Le patron, le marionnettiste de sa future vie, Zack devait s'en débarrasser, il ne voulait pas de lui tout le temps dans son dos, qu'il soit surveillé même aux toilettes, qu'il soit épié nuit et jour et devoir travailler et conspirer jour et nuit. Zack voulait vivre encore sa minorité comme un gosse, profiter de la vie comme jamais, étudier de temps en temps, trouver un passion, être logé et nourri. Trouver une fille plutôt gentille, découvrir l'amour, jouer à la balle avec les quelques gamins qui le supporteront, trouver des endroits insolites, faire des repas à l'extérieur, profiter de la nature et de son existence tout simplement. Mais tout serait différent, Sheitan ferait la police et Oroshi le juge. Après le dernier coup de marteau, la sentence était tombée, la communication rompue et le taxi prêt à apporter à destination les deux paquets de chair.

Une fois assis loin d'un éternel second d'Oroshi à l'intérieur du taxi commun, les deux prirent la direction de Brioude. La voiture n'était pas autant confortable que le coupé sport mais elle suffisait au postérieur maltraité durant des semaines de Zack. Le jeune Lacroix décida de prendre la parole, il sentait désormais qu'il pouvait avoir confiance en l'homme assis à ses côtés et tout en regardant le centre commercial s'éloigner demanda :

"Ce Sanzo, il est donc le directeur du centre, et pourquoi ce poste est-il si important, Oroshi contrôle déjà beaucoup de choses ? Quels sont ses projets pour l'école ?"

Pensant être écouté par le conducteur ou par des micros il stoppa net son interrogatoire et regarda en se mordant la lèvre inférieure le professeur, signe qu'il regrettait. Ses dents serrées désormais comme pour se taire à jamais il fixait agréablement le visage doux et charnu de l'asiatique. Il était beau, il était l'opposé physique de Zack, mais ils étaient grand tous deux, pourtant il aurait voulu être comme lui, être lui, même s'il imaginait clairement qu'il avait un nombre incalculable de choses à gérer au quotidien. C'était comme si le travail et les études étaient pour lui la priorité, pour la première fois de sa vie il se sentait capable d'être le meilleur de surpasser tout le monde, de devenir le plus fort pour fermer le clapet de tous les protagonistes de cette histoire, qu'il soit la fierté de Sheitan et son favori. La route s'assombrissait, il devait être dix-sept heures, peut-être moins, peut-être est-ce le gros nuage au dessus de la voiture qui créait cette nuit provisoire, peut-être les yeux du jeune garçon devenaient flous. Puis il eut envie de dormir, mais des crampes abdominales le tenaient en éveil. Arrivés devant l'institution comme par magie, comme si l'alcool le plus enivrant avait fait que tout ceci n'était qu'un rêve. Sheitan prit le jeune garçon sur le dos, sans qu'il puisse comprendre. Des escaliers, une porte, encore des escaliers, des paroles sourdes, comme une phrase qui ne s'arrêterait jamais, encore des escaliers, toujours une porte mais différente, la sensation de chute, les yeux ouverts puis fermés, quelques paroles de Sheitan, tout ceci allait si vite et si bizarrement.

Puis dans l'obscurité une silhouette apparut, comme un ange, puis non, un homme, Sheitan pour finir devant ses yeux en train de le réveiller doucement. Une fois ses esprit repris, le jeune garçon sursauta, provoquant une brève panique chez le professeur. Le jeune aux cheveux blonds se leva alors que l'adulte lui déconseillait fortement cela. Où était-il ? Que faisait-il ici ? C'était Delilah qui l'avait attrapé, les draps n'avaient pas la même odeur, ni la même douceur. Tout était différent mais similaire, quatre lits par contre, une douche, des toilettes, des armoires, le sac de Zack avait été déchargé dans l'armoire certainement par le professeur. En tout cas il lui dit qu'il devait être en sécurité ici, que Dellane l'avait accepté, que tout était fait, il lui fallait un peu de sommeil et de nourriture qu'il venait d'apporter à son chevet. Sur la commode était placé un plateau repas des plus simple mais simplement bon, et à l'odeur agréable. Comme une invitation Sheitan lui souriait alors qu'il pleurait, de joie, d'étonnement et il prit la liberté de lui sauter au cou.

"Merci professeur... Vous... êtres... la seule personne gentille avec moi... depuis longtemps !"

Il s'en fichait de ce qu'il penserait, il écoutait ses dires comme des saintes paroles venues du Fondateur, il écoutait ses mises en gardes et le libérait de ses bras doucement avant de rougir de honte.

"Pardonnez moi monsieur."

Il pleurait encore, en silence, mais il pleurait tout de même. Et seuls dans cette chambre tout paraissait si simple : Cacher son séjour à Delilah et l'existence même de l'institut aux yeux des autres, faire l'élève modèle, rechercher le fils Oroshi, faire tomber Sanzo, sourire, apporter le bonheur à celui qui lui avait donné la liberté. Il s'assit sur le lit, la tête contre le mur, prit le plateau repas et l'entama généreusement. Qu'il était bon de manger des légumes, des légumineuses, un bon morceau de viande encore chaude, du pain qui n'était ni rassi ni même dur, et de boire un verre de lait chaud rempli de miel. Le docteur savait ce qu'il fallait pour requinquer n'importe qui.

Sheitan avait envie de retourner derechef à Delilah, pour aller voir son père, que ce sourire pervers puisse enfin disparaître. Si seulement il pouvait l'avoir, le battre une fois pour toute, être plus fort que lui et prendre sa place, dissoudre cet endroit terrible, le faire souffrir, le voir souffrir.

Mais pour le moment il n'avait pas le choix et devait suivre ses directives, au moins pour que Zack arrive à bon port. C'était la priorité, son père n'avait pas à compter et ce garçon pourrait compter sur lui. Une voix s'éleva dans le silence de ce taxi. Le jeune homme détourna le regard de la fenêtre pour le poser sur le visage du gamin.
Seulement il ne semblait pas avoir compris qu'il n'était pas encore temps de parler, ils le pourraient plus dans l'institution, s'ils s'organisaient, mais tant que quelque chose était géré par Alexis, ils devaient se méfier.
Avant de continuer, Zack se stoppa sans que Sheitan n'ait à lui faire de signe. Il hocha la tête pour lui montrer que ça allait et jeta un regard au rétroviseur intérieur, afin d'observer le chauffeur, dont le visage demeurait inexpressif... Il valait mieux pour lui.

Le taxi continua sa route paisiblement, le docteur se força à se détendre, songeant que quelque part, il était rentré chez lui car Dellane constituait un foyer véritable, comparé à tous les endroits où ils avaient pu vivre auparavant. Et s'il était entouré d'ennemis, c'étaient probablement les meilleurs qu'il puisse imaginer.
Rapidement, le chauffeur se gara devant l'établissement, Sheitan sortit et prit la valise du garçon, et fit le tour de la voiture pour qu'il sorte à son tour. Le gamin descendit du véhicule comme s'il s'agissait d'un des douze travaux d'Hercule, il lui adressa un sourire et le docteur s'aperçut qu'il n'avait pas le choix, alors il demanda au chauffeur de hisser Zack sur ses épaules, et ils finirent par entrer dans le bâtiment.
Le jeune homme maintenait le garçon avec son bras droit, son bras gauche s'occupant à tenir la valise et à ouvrir les portes, quand son pied ne suffisait pas.

Il se dirigea vers son bureau, le sous-directeur avait un double des clefs des chambres. Il croisa sur le chemin la secrétaire du Directeur qui lui demanda qui était la personne sur son dos. Le jeune homme présenta rapidement Zack comme étant un garçon qu'il avait recueilli, faisant partie des contrôleurs de l'espace temps. Évidemment elle prit cela comme une excellente nouvelle. Le docteur lui adressa un sourire avant de saisir la clef d'une chambre vide, et rejoignit ensuite les dortoirs, le gamin assoupi toujours dans son dos.
Il gravit les marches une par une et parvint enfin à la chambre n°4, il déposa la valise sur le sol puis le plus doucement possible, posa son protégé sur un des lits, retirant les chaussures du garçon il lui expliqua qu'il allait revenir et qu'il devait se reposer pour l'instant.
Le jeune homme fit le lit par dessus le garçon puis sortit de la chambre à pas feutrés. L'important maintenant était d'aller voir Sanzo. Il ne pouvait pas refuser Zack vu les circonstances...

Arrivé devant le bureau du directeur, il frappa trois coups avant d'ouvrir la porte. Le directeur était assis à son bureau, et Sheitan fut bref. Il expliqua qu'il venait de rencontrer un garçon qui avait le pouvoir d'accélérer les cellules, donnant pour exemple la démonstration de la fleur qui lui avait été présenté. Le docteur proposa d'être le garant de cet enfant, mais Kichigai expliqua que l'institution disposait de fonds pour ce genre de cas.
Finalement l'affaire fut conclue en une poignée de main, pour une fois sincère de la part de Sheitan, et Zack Lacroix fut inscrit dans les regitres.

Le professeur se dirigea vers le self et entra directement dans les cuisines, saluant l'ensemble du personnel d'un « Bonsoir ». Il expliqua ensuite le cas du jeune Zack et les aida à préparer le plateau repas qu'il désirait pour le garçon.
Quelques minutes plus tard, le fringuant jeune homme montait les marches qui menaient aux chambres des élèves, le plateau repas sur sa main droite et un morceau de pain dans la gauche qu'il mangeait pour se remplir l'estomac.
Finalement il arriva devant la porte de la chambre n°4, son morceau de pain fini, et entra sans bruit, posant le plateau sur une commode. Le garçon dormait toujours, alors il prit ses affaires et les rangea dans l'armoire. Maintenant Zack avait un chez lui et n'était plus seul.
Alors qu'il fermait l'armoire et s'approchait du garçon, celui-ci sembla se réveiller.

« Ah te revoilà. »

Le docteur sourit et s'accroupit à côté du lit du garçon et tenta de le calmer, voyant un air apeuré sur son visage.

« Ne t'en fais pas, tu es en sécurité ici à présent. Bienvenue à Dellane. Je me suis occupé de ton inscription. Le plus important maintenant, c'est que tu sois en forme... Je t'ai apporté à manger, après tu pourras t'endormir tranquillement. »

Le gamin sembla s'éveiller alors, cela le fit sourire, et sans qu'il puisse faire quoique ce soit, Zack se jeta sur lui pour le prendre dans ses bras. Sheitan écouta les paroles du garçon avec un fin sourire, avant de lui en confier d'autres à l'oreille :

« Je serai là ici pour toi, mais tu ne pourras probablement pas faire confiance aux autres, je ne te le conseille pas. Mais profites d'être ici et reprends goût à la vie. »

Le garçon s'éloigna naturellement au bout de quelques secondes, rougissant légèrement. L'adulte lui adressa un nouveau sourire, et se leva en passant sa main dans les cheveux du garçon qui pleurait.
Il lui rapprocha le plateau et s'assit sur le lit opposé, avant de s'étirer doucement.
Zack mangeait paisiblement, essuyant ses larmes sur sa manche, il avait le sourire, semblait se sentir bien.
Il avait une nouvelle vie devant lui, il pourrait sûrement réussir dans cette vie-là d'ailleurs... Seulement il n'y aurait que l'avenir pour le dire. Sheitan se promit de ne pas influer sur la vie du jeune garçon, pas plus que de raison, pas si cela le mettait en péril.
Il avait maintenant quelqu'un dont il devait s'occuper. Chose nouvelle et étrange pour lui, mais elle lui tenait à cœur, car pour une des premières fois de sa vie, il avait lui même décidé quelque chose, il avait fait un choix qui changerait son existence. Et il était prêt à assumer ce choix.